Été 1943. Deux cousins en vacances à Neuville aux Bois .
1943. Henri Chamussy, tout heureux à la Pichardière |
Récit d'Henri Chamussy. (Courrier à VPF du 1er novembre 2000.)
"Je profite de ce courrier obsolète qu'est une vieille lettre timbrée et jetée dans une boîte aux lettres (après avoir probablement fait poche restante pendant quelques jours) pour dire que j'ai lu, avec plus que de l'intérêt “La famille dans la tourmente de la dernière guerre”, Vème partie, 1943, et en particulier, pages 418-419, les passages Consacrés à La Pichardière en juillet-août 1943.
"Je profite de ce courrier obsolète qu'est une vieille lettre timbrée et jetée dans une boîte aux lettres (après avoir probablement fait poche restante pendant quelques jours) pour dire que j'ai lu, avec plus que de l'intérêt “La famille dans la tourmente de la dernière guerre”, Vème partie, 1943, et en particulier, pages 418-419, les passages Consacrés à La Pichardière en juillet-août 1943.
Car il se trouve qu'à ce moment - en août probablement j'ai séjourné à Neuville-aux-Bois chez grand-père et grand'mère Lesort, séjour qui, dans mon souvenir, me semble avoir été très long (et très heureux), mais qui en fait a probablement duré deux ou trois semaines...
J'avais huit ans, mais ma mémoire a enregistré des images probablement un peu déformées par les cinquante-sept ans écoulés depuis ces vacances, mais très nettes. Convoyé depuis la Bourgogne jusqu'à Paris par tante Hélène Chamussy (la sœur de Papa), j'avais été fourré dans un autocar poussif de Paris à Neuville (il y avait donc des cars de Paris à Neuville ?). J'étais coiffé d'un chapeau de paille que grand'mère avait trouvé très "paysan" (je crois que ce n'était pas un compliment...).
En revanche, curieusement, je n'ai conservé aucun souvenir du voyage de retour, de Neuville à Lyon.
Grand-père et grand'mère avaient loué un petit appartement dans Neuville, rue Donon, et avaient eu la bonne idée d'inviter en même temps que moi Jean-Michel Dhavernas. Le logement était modeste et, pour accéder aux W-C., il fallait traverser la cour hantée par un chien féroce dont j'avais une peur bleue. La légende familiale veut que Jean-Michel n'en ait pas eu peur du tout, et on me faisait honte de ma couardise. Je reste persuadé que Jean-Michel en avait aussi peur que moi, mais avait habilement manœuvré devant le tribunal grand-parentesque.
Grand-père nous entraînait dans des promenades à pied, barbe en avant et canne sonnant sur les graviers, d'un pas féroce que nous avions du mal à emboîter, vers des lieux aussi exotiques que la Mardelle, ou le "grand gouffre" [une sablière abandonnée], avec quelques incursions en forêt. Nous allions aussi goûter sous l'orme de la Brase, quand le vent n'y apportait pas les odeurs d'un atelier d'équarrissage dont l'idée même me soulevait le coeur ...
Mais bien entendu nous allions quotidiennement à la Pichardière et je vois encore très bien oncle Jules, coiffé, me semble-t-il, d'un vaste couvre-chef (l'été a dû être très beau, je n'ai que des souvenirs ensoleillés) et assis dans son fauteuil devant la maison. Je me souviens qu'il bavardait très gentiment avec Jean-Michel et moi, nous posant des questions sur nos "études". Tante Germaine devait être également là, puisque oncle Jules se réjouit de son arrivée le 4 août, "et que les Lesort arriveront à peu près en même temps". Il semblerait que tante Geneviève et oncle Léon Zeller étaient également à Neuville à ce moment, mais je n'ai pas conservé le souvenir, sinon que je revois, dans ma mémoire, d'autres gens que grand-père, grand'mère et oncle Jules devant la Pichardière.
Côté sombre de ces vacances lumineuses : mon admission en septième chez les Jésuites du collège Sainte-Hélène, à Lyon, avait peut-être posé quelques problèmes, car j'étais, une heure par jour, confié aux bons soins d'un instituteur neuvillois qui me faisait le calcul et l'orthographe. L'heureux Jean-Michel ne partageait pas cette corvée, ce dont j'ai gardé, à travers les décennies, une jalousie ineffaçable...
La lecture de ce numéro de Notre Famille m'a replongé dans ces souvenirs lointains. Heureux âge : je ne me sentais nullement "dans la tourmente", et pourtant je revois des tas de choses de l'époque, les bombardements de Lyon, des défilés allemands, la Libération l'été suivant …" Henri
L'anecdote racontée par tante Cici Lesort.
Tante Cici, récemment fiancée à Xavier Lesort, devait, de son côté, être présentée très officiellement à la Pichardière ce même été 1943.
Tante Cici, récemment fiancée à Xavier Lesort, devait, de son côté, être présentée très officiellement à la Pichardière ce même été 1943.
Elle avait été adoubée par notre grand-mère Elisabeth Lesort (lettre à Germaine Madelin, sa nièce) :
"Nos "pièces rapportées" sont décidément très réussies et me voilà délivrée de la crainte d'avoir des belles filles pimbêches, la nouvelle Cécile étant un trésor de simplicité et d'entrain. Elle a tout à fait sa place dans la famille et s'initie, peu à peu, au "mystère" Lesort, comme disent mes enfants lecteurs de Mauriac."
"Nos "pièces rapportées" sont décidément très réussies et me voilà délivrée de la crainte d'avoir des belles filles pimbêches, la nouvelle Cécile étant un trésor de simplicité et d'entrain. Elle a tout à fait sa place dans la famille et s'initie, peu à peu, au "mystère" Lesort, comme disent mes enfants lecteurs de Mauriac."
La mecque familiale de la Pichardière faisait partie intégrante du “mystère” Lesort et honneur suprême, tante Cici avait été logée à la Pichardière même alors que nos grands-parents, eux-mêmes, logeaient effectivement dans le bourg de Neuville.
Rendant visite à sa future belle-mère, dans son logement à Neuville, tant Cici avait assisté à une scène qu’elle avait trouvé du plus haut comique et qu’elle aimait bien raconter avec sa verve habituelle et son rire contagieux.
Henri et Jean-Michel, nos très jeunes gaillards, tous deux confiés à la garde de leur grand-mère, faisaient de concert une très discrète et très légère toilette de chat dans une même cuvette, sous la surveillance plutôt distraite de Grand-Mère, complètement prise par la narration, aux effets dramatiques, de son histoire préférée, le petit Ravageot !
1943. Jean-Michel et Henri à la Pichardière avec Dominique Lesort au premier plan, André Lesort et Moineau Lesort au deuxième plan. |
Commentaire de Jean-Michel Dhavernas.
(mail au blog Lesort-Madelin en mai 2014)
(mail au blog Lesort-Madelin en mai 2014)
"Effectivement, Henri et moi avons très souvent séjourné ensemble soit dans nos familles à Paris, Versailles, Moroges etc., soit chez des oncles et tantes diverses : Tante Mimine, qui était ma marraine, à la bibliothèque d'Orléans, tante Nicole Chabert à Gérardmer etc.
Il est exact que grand-père et grand-mère nous ont emmené pour un court séjour à la Pichardière. Je crois que c'était après la guerre [en fait 1943]. Nous devions avoir une dizaine d'années [huit ans]. Ils avaient loué un petit logement dans Neuville aux Bois. Henri et moi partagions une chambre et un grand lit dans un autre bâtiment. Il fallait traverser une petite cour. Notre problème était la présence d'un terrifiant petit roquet qui régnait en maître sur ladite cour et, bien sûr, nous terrorisait. La stratégie pour rejoindre notre chambre était simple : surprendre le monstre par un sprint olympique et, le souffle court, claquer aussitôt derrière nous la grosse porte en bois. Le problème se compliquait pour les WC. Seul accès : la cour. Il s'agissait donc d'en limiter l'usage au maximum, surtout le soir. Nous avons donc longuement étudié différentes tactiques ainsi que plusieurs techniques de contraction musculaire bas-ventrale. Par exemple, s'enrouler très étroitement dans l'édredon du lit. Guère de succès mémorable! Finalement, après moult hésitations et interrogations angoissées, il nous fallait bien affronter courageusement le danger...Nous nous en souvenons encore ! Quant à la toilette citée par tante Cici–sur quelles indications ?... [celles de ses propres yeux, voir précédemment] elle se faisait évidemment avec un broc d'eau froide sur une cuvette émaillée (heureusement pas dans la cour). Ce devait effectivement être ultra-rapide. Je ne crois pas que grand-mère avait emporté le livre du Petit Sauvageot [Petit Ravageot, mais elle le connaissait absolument par coeur] avec elle. Elle nous l'avait déjà lu et relu depuis longtemps. Mais "si non e vero." Et c'est un bon souvenir que nous partageons avec Henri.
La Pichardière appartenait alors à l'oncle Jules Madelin. Pourquoi avait-il interdit de grimper aux arbres?..Mais c'est grâce à ce séjour que j'ai connu La Pichardière, son parc, l'orme de la Braze etc ... sous la houlette des grands-parents." Jean-Michel