Hervé Kervella |
Texte rédigé par Bénédicte Grouin pour la célébration d'inhumation d'Hervé le 11 juin 2013 à Amiens :
Nous
sommes réunis ce matin autour d'Hervé pour le confier à la
tendresse de Dieu. Nous ses frères et sœurs, ses cousins, savons
qu'il a eu une vie professionnelle chaotique, entrecoupée de
périodes de chômage sûrement douloureuses, et des relations
humaines pas toujours faciles.
Nous
savons aussi qu'il était capable de gestes d'attention délicats,
comme choisir avec soin et affection des cadeaux judicieux. Cette
affection, il la cachait avec pudeur sous des dehors bourrus, et elle
nous touchait d'autant plus lorsqu’il l'exprimait.
Hervé
aimait rendre service : combien de pipes a-t-il fumées dans les
salons de nos cousins, veillant sur le sommeil de leurs enfants,
profondément heureux de pouvoir offrir ces quelques heures de
liberté à leurs parents. Lui qui doutait souvent de ses capacités
dans certains domaines et n'avait pas toujours confiance en lui, se
sentait reconnu et apprécié pour sa grande serviabilité, et cela
l'aidait certainement à proposer généreusement ses services.
Hervé
était un solitaire, et ce n'est pas un hasard s'il était passionné
par la moto et par le tir, sport dans lequel il excellait, grâce à
une vue exceptionnelle et à une concentration dont il avait le
secret. Sa curiosité intellectuelle faisait de lui, particulièrement
ces dernières années, un grand lecteur, aussi bien de la Bible, que
de revues scientifiques ou d'ouvrages historiques.
II
aimait la beauté: particulièrement la beauté de la montagne (et sa
période de chasseur alpin est restée comme un rayon de soleil dans
sa vie), et la beauté de la musique (les morceaux que nous avons
choisis pour cette célébration comptent parmi ses préférés) (*).
Si
ses relations avec les adultes étaient parfois difficiles, il se
régalait avec les bébés et les enfants, qui Ie lui rendaient bien.
Et à ce propos, parmi les témoignages d'affection reçus ces
jours-ci, je voudrais citer celui de notre cousine Emmanuelle : « Ce
mystérieux enfant mal grandi, si gentil, me faisait penser à Peter
Pan ou à Mowgli. II a bien plu à mes enfants, justement, parce
qu'il n'était ni adulte ni enfant, juste une personne charmante
(...) Cette mort solitaire lui ressemble terriblement. »
Nous
gardons au cœur le regard bleu perçant, l’honnêteté
scrupuleuse et les conseils tatillons de celui que ses amis avaient
un jour surnommé affectueusement « I'anarcho-syndicaliste-chrétien
», et nous remercions Dieu de nous l'avoir donné comme frère. Et
nous sommes habités par la même espérance qu'il y a six mois
lorsque, entourés de la communauté bénédictine de la
Pierre-qui-Vire, nous avons confié papa, « frère Pierre », à la
miséricorde infinie du Père de toute vie.
(*) :
Andante du Concerto pour piano n°21 de Mozart, et « Petite
fleur » de Sidney Bechet